Reconnaître les signes de détresse psychologique en milieu de travail

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Comment déterminer si l’apparente jovialité d’un collègue ne masque pas une sombre mélancolie? Si un sourire ne cache pas une immense tristesse? Si un excès de confiance n’est pas une façade qui dissimule une profonde angoisse? Il est possible que vous-même, en lisant ces lignes, souffriez en silence.

Selon le Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH)1, chaque année, 1 Canadien sur 5 est aux prises avec un trouble psychologique ou un problème de dépendance. Une personne voulant demander de l’aide se heurte à une foule d’obstacles, l’un des plus grands étant les préjugés qui entourent la santé mentale. Seulement 50 % des Canadiennes et des Canadiens diraient à leurs amis ou leurs collègues de travail qu’un membre de leur famille est atteint d’un trouble psychologique, alors que 72 % feraient état d’un diagnostic de cancer et 68 % reconnaîtraient qu’un membre de leur famille est diabétique. Devant ces chiffres, quelle est la probabilité qu’une personne communique ses propres difficultés? 39 % des travailleurs de l’Ontario affirment qu’ils n’informeraient pas leur supérieur s’ils souffraient d’un problème de santé mentale. Cela n’a rien d’étonnant, car la même étude conclut que 64 % des travailleurs de l’Ontario s’inquiéteraient des conséquences sur leurs fonctions advenant qu’un collègue soit atteint d’un trouble psychique.

Les troubles psychologiques demeurent l’une des principales causes d’invalidité au Canada. Ils entraînent aussi une hausse de l’absentéisme et du présentéisme. Si la bonne santé mentale des employés d’une entreprise est un facteur essentiel de sa croissance économique, certains membres de l’équipe pourraient probablement aller mieux et d’autres membres de cette même équipe aimeraient probablement leur venir en aide.

Alors, comment peut-on reconnaître les signes de détresse psychologique en milieu de travail ? 

Informez-vous avant toute chose

La première étape consiste à comprendre les problèmes de santé mentale qui peuvent se manifester. Même si des thèmes comme la sexualité et l’hygiène physique et buccale sont abordés durant le cheminement scolaire, la plupart d’entre nous ont une compréhension limitée de ce qu’est la santé mentale. Cela donne lieu à de fausses croyances et à des erreurs d’interprétation. Pour aider l’un de vos collègues, il vous faut d’abord comprendre les troubles et les maladies mentales qui sont susceptibles de l’affliger. Il faut aussi pouvoir reconnaître le dénominateur commun de ces affections, les obstacles que ces personnes doivent surmonter, de même que les barrières culturelles ou systémiques qui les empêchent de demander de l’aide.
Toutefois, rappelez-vous que vous n’êtes pas apte à établir un diagnostic de trouble de santé mentale, car seul un professionnel compétent en la matière et dûment autorisé à pratiquer peut diagnostiquer une telle affection et proposer un traitement.

Soyez attentif aux changements

La personne qui souffre intérieurement montre parfois des signes évocateurs qui peuvent se rapporter à son apparence, son efficacité, son engagement ou sa conduite. Au travail, elle peut adopter des comportements atypiques ou réagir de manière inattendue.

Voici quelques exemples :

  • Elle connaît une baisse de productivité, laquelle peut s’expliquer par un manque de motivation.
  • Elle néglige son apparence et se soucie parfois peu ou pas de son hygiène personnelle ou de son aspect physique; elle choisit de ne pas allumer la caméra de son ordinateur durant les réunions virtuelles.
  • Elle s’absente plus souvent, arrive en retard ou prend fréquemment des congés de maladie, ou elle se présente obligatoirement au travail, peu importe son état de santé.
  • Elle peut manquer de concentration et chercher à s’effacer en évitant les interactions, en annulant les réunions ou en n’y participant pas, en se déconnectant de Teams ou Slack, ou en ne donnant pas suite aux demandes.
  • Son attitude n’est plus la même; elle a des sautes d’humeur ou se montre nerveuse, agitée, anxieuse ou irritable.
  • Elle ne s’adonne plus aux activités qu’elle pratiquait, comme le conditionnement physique ou le bénévolat.
  • Elle vous dit sans détour qu’elle est en crise!

Comment aborder une personne qui souffre

  • Prenez d’abord conscience de votre propre capacité à aborder la délicate question de la santé mentale. Établissez vos limites et acceptez le fait que vous ne pouvez être disponible tout le temps et en tout temps. N’oubliez pas que pour pouvoir prendre soin des autres, il faut avant tout prendre soin de soi.
  • Déterminez si vous êtes la bonne personne pour traiter le sujet ou s’il ne serait pas plutôt préférable de laisser ce rôle à quelqu’un d’autre.
  • Discutez ensemble dans un endroit privé.
  • Faites preuve d’ouverture, évitez de porter des jugements et modulez vos interventions en conséquence.

Voici quelques questions suggestives :

  • « Est-ce que tout va bien? »
  • « J’ai remarqué que quelque chose ne va pas. »
  • « Je me fais du souci pour toi; comment te portes-tu? »
  • « Comment puis-je t’aider? »
  • Si vous ne savez pas quoi lui dire, posez-lui une question ouverte en utilisant « qu’est-ce que… », « comment… » ou « peux-tu me dire… »
  • Si elle n’est pas prête à parler, faites-lui comprendre que vous serez là pour l’écouter en temps et lieu. Certaines personnes ont besoin de temps pour s’ouvrir et se confier, ce qui est tout à fait normal.
  • Gardez en tête que vous ne pouvez avoir réponse à tout.
  • Évitez de tirer des conclusions hâtives et d’émettre des hypothèses.
  • Intéressez-vous à ce qu’elle vit, manifestez de l’empathie et écoutez-la sans chercher à trouver l’origine du problème ou à lui prodiguer des conseils.

Que faire si le silence s’installe

Même si toutes les mesures sont mises en place pour favoriser l’ouverture et la discussion, certains d’entre nous ne sont tout simplement pas à l’aise d’exprimer nos émotions. Et il faut respecter cela. En définitive, chaque personne est responsable de sa santé mentale, et demander de l’aide ‒ ou non ‒ est un choix personnel.

Quand tendre la main

Protégez le caractère privé et confidentiel de la conversation du mieux que vous le pouvez. Si les symptômes ou les comportements de la personne malade peuvent mettre sa sécurité ou celle des autres en danger, il serait préférable de demander de l’assistance.

Si vous estimez qu’un tiers serait mieux placé pour prendre la situation en main, appelez du renfort. Cela peut être nécessaire si, par exemple, un cadre souffrant d’un trouble psychologique met un employé en péril ou le place dans une position délicate. On peut aussi penser à toute situation assortie de conséquences négatives pouvant menacer la fonction ou la réputation d’un employé. Dans de tels cas, il peut être judicieux d’aviser le service des ressources humaines ou le supérieur immédiat de cette personne.

Quoi faire si l’un de vos collègues se trouve dans une situation difficile

Pour commencer, écoutez cette personne aussi longtemps que possible et du mieux que vous le pouvez. Réconfortez-la en lui disant qu’il est normal qu’elle se sente de la sorte et qu’elle ait besoin de soutien. Présentez-lui les ressources dont elle dispose et référez-là à un organisme de santé, une organisation communautaire ou une ligne d’écoute téléphonique.

Nos experts peuvent soutenir les employés dans le besoin dès qu’ils ont besoin – n’hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions.

  1. Mental illness and addiction: Facts and statistics. Centre de toxicomanie et de santé mentale. (s.d.). Consulté en 2021 à l’adresse https://www.camh.ca/en/driving-change/the-crisis-is-real/mental-health-statistics (en anglais seulement).